Période des questions : La collecte de données désagrégées selon la race

Par: L'hon. Jim Munson

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War memorial, Ottawa

L’honorable Jim Munson : Tout d’abord, monsieur le leader du gouvernement au Sénat, je vous trouve très sympathique. En cette dernière journée de la session, je repense au fait que, à l’époque, on préparait M. Chrétien pour la période des questions chaque jour, et ce dernier écoutait attentivement. On vous prépare aussi chaque jour. Or, M. Chrétien disait ce qu’il voulait lors de la période des questions, ce qui était probablement la bonne chose à faire parce qu’il parlait avec son cœur.

La question comporte un court préambule parce que j’estime qu’il est important. Il porte sur la race. C’est un facteur important, compte tenu de la propagation de la COVID-19. Quand on examine les maisons de soins infirmiers, dont le personnel est composé essentiellement d’immigrantes ainsi que de migrants et de réfugiés — à Montréal, c’est le cas de 80 % du personnel — et qui sont de plus en plus financées par le secteur privé, qui est à but lucratif, on constate que ce modèle de gestion a créé des conditions dans lesquelles la COVID-19 et d’autres infections se sont propagées rapidement. On a dit que la réticence à parler de la race dans les foyers de soins de longue durée semble contribuer à ce qu’on appelle « la production de rapports aveugles à la race ». De plus, nous savons que les travailleurs qui offrent des soins de longue durée sont mal rémunérés et doivent survivre en travaillant partout.

La Colombie-Britannique a pris conscience de ce problème et en a donc profité pour augmenter les salaires de ces travailleurs, leur permettant également d’accéder à des postes à temps plein. Cependant, pour engranger des profits, les propriétaires de centres de soins privés comptent sur une main-d’œuvre de travailleurs immigrés et migrants, racialisés et sexospécifiques, car ce sont majoritairement des femmes. En Ontario, 90 % de ces travailleurs ont subi des violences physiques.

Il y a deux jours, lors d’un webinaire au Victoria Forum, fruit d’un partenariat entre l’Université de Victoria et le Sénat, le modérateur et le consul général du Canada ont souligné la nécessité de recueillir des données fondées sur la race afin d’assurer une meilleure prise de décision, pour savoir qui a besoin de quoi et quand. Cela se fait maintenant dans certaines villes.

La question que j’aimerais vous poser, par rapport à cette approche qui fait fit des distinctions raciales, et parce qu’on assiste à une hausse des inégalités en matière de santé pour les populations noires et autochtones, est la suivante : pourquoi le gouvernement fédéral n’a-t-il pas rendu obligatoire la collecte de données fondées sur la race, compte tenu notamment des éléments indiquant que les communautés racialisées ont été parmi les plus durement touchées par la COVID-19?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de poser la question et de soulever le problème, qui a été mentionné à plusieurs reprises et à juste titre dans cette enceinte.

Je ne vais pas me cacher derrière des normes constitutionnelles qui régissent les rapports fédéraux-provinciaux pour dire qu’il y a des secteurs dans lesquels le gouvernement fédéral peut agir et d’autres qui relèvent des provinces, notamment en ce qui concerne les soins de santé.

Pas plus tard qu’hier, le ministre Blair nous a expliqué que la façon de voir la collecte de données fondées sur la race avait évoluée. Ces données ont déjà été utilisées de manière pernicieuse pour priver de possibilités de nombreuses personnes, y compris des membres de ma famille, mais nous comprenons maintenant mieux leur importance.

Comme je l’ai déjà dit dans cette enceinte, le gouvernement a amorcé une réflexion compte tenu de la nécessité de mieux comprendre les différentes répercussions non seulement de la pandémie sur le plan sanitaire, mais aussi de nos programmes, de manière plus générale, sur les différentes communautés du Canada.

Comme l’a dit le ministre hier, le gouvernement réfléchit sérieusement à des moyens de procéder avec des données désagrégées parce que, pour le dire en français, :

Il faut qu’il y ait des balises appropriées pour faire en sorte qu’on puisse protéger ces données.

Il est dans l’intérêt des Canadiens de voir à ce que ces données soient utilisées de façon appropriée et à ce qu’elles ne servent pas à faire de la discrimination.

Je m’excuse aux interprètes d’avoir changé de langue au milieu d’une phrase.

Le sénateur Munson : Merci de la réponse, mais je crois que tous les sénateurs conviendront avec moi que la COVID-19 n’a que faire des frontières ou des compétences fédérales et provinciales. Statistique Canada est là, et je vous implore ardemment, les ministres et vous, d’avoir recours à ses services pendant l’été pour recueillir des données sur la race parce qu’elles seront extrêmement utiles, car les chiffres ne mentent pas. Je crois que cela nous aiderait à comprendre ce qui s’est passé dans tous les foyers pour personnes âgées au pays, en particulier dans les foyers du secteur privé. On semble na pas avoir vu ce qui se passait.

Encore une fois, je demande aux ministres de s’en remettre à Statistique Canada, qui a fait un excellent travail pour montrer qui nous sommes, comment nous nous sentons en tant que pays et comment nous avons bâti cette incroyable société. Les données ne mentent pas. Il est important de délaisser cette approche sans différenciation.

Le sénateur Gold : Merci. Ma réponse n’était pas une tentative de me servir de la bonne vieille excuse des débats constitutionnels. Je crois avoir répondu à la question concernant Statistique Canada. Chose certaine, elle a été posée au gouvernement. Le gouvernement envisage vraiment d’avoir recours à Statistique Canada pour la collecte et l’analyse de données désagrégées sur la race.

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