Deuxième lecture du projet de loi S-242, Loi modifiant la Loi sur la radiocommunication

Par: L'hon. Marty Klyne

Partager cette publication:

L’honorable Marty Klyne : Honorables sénateurs, c’est un honneur de prendre la parole pour appuyer le projet de loi S-242 présenté par le sénateur Patterson. J’espère que cette mesure législative importante recevra l’appui dont elle a besoin pour être adoptée tant au Sénat qu’à l’autre endroit.

Je note avec intérêt que, depuis 20 ans, des sénateurs et des députés de tous les partis, de tous les groupes et de tous les caucus ont pris la parole et dit clairement qu’il fallait améliorer le service Internet à large bande dans les régions rurales et éloignées du pays ainsi que dans les régions où vivent majoritairement des Autochtones. Tous les Canadiens devraient avoir une chance égale de profiter d’Internet et des services qui y sont associés, comme la télémédecine et les soins de santé virtuels, de même que la possibilité de recevoir des services sociaux, de faire des études, de se perfectionner et de remplacer de vieux systèmes d’affaires patrimoniaux par de nouvelles applications.

(1720)

L’accès à Internet permet une participation accrue dans de nouvelles économies de marché, amenant une transformation économique pour les nations autochtones et les collectivités rurales et éloignées. C’est un enjeu qui transcende les régions, les provinces, les allégeances politiques et même les divers ordres de gouvernement. Les demandes sont très semblables, même si les politiciens qui les font ont d’habitude peu en commun. Franchement, c’est un message qui n’a pas vraiment changé au fil des décennies. Le besoin de meilleurs services à large bande dans les régions rurales et éloignées demeure grand. En fait, il n’a fait que devenir plus criant au fil du temps.

Je ne répéterai pas le texte du projet de loi du sénateur Patterson. Je me contenterais de dire que, s’il est adopté, le projet de loi exigerait que les titulaires de licences de spectre Internet, c’est-à-dire une licence permettant de fournir des services Internet dans une zone géographique visée, offrent des services Internet à au moins 50 % de la population dans la zone mal desservie couverte par la licence, et ce, dans les trois ans suivant la délivrance de celle-ci. Si l’entité ne respecte pas cette exigence, la licence serait récupérée par le gouvernement et remise aux enchères.

En vertu de la loi actuelle, une entreprise titulaire d’une licence de spectre n’est pas légalement tenue de l’utiliser. De nombreuses entreprises choisissent plutôt de conserver simplement leur spectre, sans l’utiliser pour offrir des services Internet aux Canadiens, dont beaucoup ont besoin de ce service ou de services améliorés. Bon nombre de ces entreprises revendent éventuellement leur spectre, réalisant ainsi des millions de dollars de profits sans avoir fait quoi que ce soit pour offrir de meilleures options à large bande dans les localités rurales et éloignées. C’est une bonne chose pour l’entreprise qui vend le spectre à profit, mais c’est un mauvais résultat pour les contribuables et les Canadiens, qui paient en général plus cher pour la large bande et ont moins de fournisseurs de services parmi lesquels choisir comparativement aux consommateurs d’autres pays développés.

Le projet de loi S-242 contribuerait à mettre un terme à la pratique des entreprises privées qui ne font rien de leur licence de spectre. L’approche qui les force à l’utiliser sous peine de la perdre se fait attendre depuis longtemps et elle est tout simplement logique. Lorsque le gouvernement fédéral vend le spectre aux enchères à des entreprises privées, son objectif premier est d’offrir des options de services Internet à large bande aux Canadiens dans les marchés mal desservis. Malheureusement, lorsque les entreprises choisissent plutôt de ne pas se servir de leur spectre, elles rendent un bien mauvais service aux personnes qui vivent dans des régions à population limitée ou dans des régions où la pauvreté et d’autres problèmes rendent la connexion à Internet plus difficile que dans les centres urbains.

Le fait que des entreprises privées accaparent des parties du spectre sans les utiliser rend ces difficultés plus difficiles à surmonter, et un vaste écart entre les régions urbaines et rurales ou éloignées continue d’exister sur le plan de la prospérité et de l’économie. Il est temps de changer ce comportement, et c’est pour cette raison que j’appuie le projet de loi.

Bien sûr, le spectre des télécommunications et la façon dont il est distribué ne sont qu’une partie du problème. Je ne crois pas que le projet de loi S-242 réglera tous nos problèmes en matière d’amélioration des services Internet à large bande dans les régions rurales. Toutefois, il forcera les fournisseurs de services Internet à offrir un service meilleur et plus fiable dans plus de régions du pays, et ce serait une grande amélioration par rapport au statu quo. En fait, la situation actuelle n’est pas simplement un inconvénient pour les Canadiens des régions rurales. Elle coûte au pays une productivité et un potentiel économique non réalisés.

En avril dernier, pendant la période des questions, j’ai posé une question au sénateur Gold sur l’énorme écart qui existe entre les Autochtones et les non-Autochtones en ce qui concerne l’accès aux services Internet avec une vitesse de téléchargement et de téléversement de 50/10 mégabits par seconde.

Bien que j’apprécie beaucoup le travail du gouvernement du Canada et les fonds qu’il s’est engagé à dépenser pour combler cet écart, et pour combler l’écart dans les régions rurales et éloignées de façon plus générale, il n’en demeure pas moins que l’objectif n’a toujours pas été réalisé. Il est bien connu que les services à large bande dans le Nord sont peu fiables, et c’est la même chose dans de nombreuses régions rurales de l’Ouest du Canada, surtout dans les communautés autochtones.

En tant que sénateur pour la Saskatchewan, je suis bien conscient des défis pour les habitants autochtones de ma province qui vivent à l’extérieur des grands centres, Regina et Saskatoon. Les histoires que j’entends ne sont pas de simples anecdotes. Dans son Rapport de surveillance des communications de 2020, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, ou CRTC, a fourni des statistiques sur le pourcentage de foyers dans les réserves des Premières Nations qui ont accès à des services Internet à large bande selon la norme établie par l’organisme, soit des vitesses de téléchargement et de téléversement de 50/10 mégabits par seconde. En Saskatchewan, le nombre de foyers dans les réserves ayant accès à ces vitesses est de seulement 1,7 %. Au Manitoba, le taux est de 2 %. Nous devons faire mieux.

Encore une fois, ne pas agir pour améliorer les services à large bande entraîne des coûts. Un article de 2021 de l’Edmonton Journal a souligné que, pendant la pandémie de COVID-19, certains foyers des Territoires du Nord-Ouest payaient jusqu’à 2 000 $ par mois en frais d’utilisation excédentaire. C’était à un moment où travailler à distance et s’isoler était obligatoire pour beaucoup de gens. C’est injuste. Cela ne peut pas durer. Une infrastructure défaillante, une concurrence limitée et des lois laxistes sur le spectre ont toutes contribué à cette situation inacceptable, en particulier pour les peuples autochtones.

Un élément clé de la réconciliation consiste à travailler ensemble pour que les Premières Nations, les Métis et les Inuits puissent jouir des mêmes possibilités économiques que les autres Canadiens. Un écart numérique se creuse entre les Autochtones et les non‑Autochtones au Canada. Si les Autochtones n’ont pas un accès juste et équitable à des services Internet à large bande, l’écart se creusera davantage, et cela aura des conséquences économiques dévastatrices pour l’un des groupes démographiques dont la croissance est la plus forte au pays.

Nous risquons d’empêcher toute une génération de jeunes Autochtones d’atteindre leur plein potentiel économique. Nous devons corriger cela. J’estime que le projet de loi S-242 est un premier pas important dans cette direction.

La réalité, c’est qu’il n’y a rien d’autre que je puisse dire à ce sujet qui n’ait déjà été dit une centaine de fois par des politiciens de tous les ordres de gouvernement et de toutes les allégeances politiques. En fait, c’est l’une des rares causes qui font l’unanimité chez les partisans de tous les partis : les Canadiens ont besoin d’un meilleur accès au service Internet à large bande. Une réforme de la méthode qu’emprunte le gouvernement du Canada pour vendre aux enchères ses licences d’utilisation du spectre et protéger l’intégrité de ce dernier serait avantageuse pour tous, sans oublier qu’il faut renforcer l’utilisation du Fonds pour la large bande universelle et veiller à sa bonne gouvernance.

Honorables sénateurs, je suis tenté de conclure mon discours en affirmant qu’il est temps d’améliorer l’offre de service Internet à large bande au pays. Ce serait cependant inexact. La vérité, c’est que cela aurait dû être fait il y a au moins 20 ans. Comparativement aux autres pays développés, le Canada est très en retard, et si le projet de loi S-242 nous permet de rétrécir un tant soit peu cet écart, il faut le soutenir.

Internet n’est pas seulement un outil dont peuvent se servir les petites entreprises pour vendre leurs produits partout sur la planète ou une ressource utile aux écoliers lorsqu’ils font leurs devoirs. C’est notre moyen de communiquer avec les autres. Il faut que l’accès à Internet à large bande soit aussi étendu et équitable que possible. C’est pour cette raison que j’appuie le projet de loi.

Honorables sénateurs, je suis très heureux d’appuyer le projet de loi S-242 et j’espère que mes collègues de tous les groupes l’appuieront également. Merci.

Partager cette publication: