L’honorable Dennis Dawson :
Pierre De Bané, ou « Pierre De Bane de Matane », comme certaines personnes l’appelaient affectueusement dans les années 1970, a eu beaucoup d’influence dans ma vie. Le sénateur De Bané faisait la tournée des cégeps au cours des années 1970, dans les milieux péquistes, pour convaincre les jeunes qu’il était possible d’être fédéraliste et libéral, tout en étant nationaliste. C’est une bataille qu’il a menée toute sa vie, au même titre que sa bataille pour défendre les régions, comme l’ont souligné plusieurs personnes. Il a été l’instrument de la défense de l’est du Québec, et je le remercie de sa contribution.
Ces jeunes députés voulaient prouver qu’on pouvait être nationaliste, et le sénateur De Bané l’a été. J’ai eu l’occasion de le voir à l’œuvre. C’est un sujet qui n’a pas été soulevé, parce que plusieurs choses ont été dites, que je ne répéterai pas, mais il a été un défenseur des gens de l’air avec le sénateur Joyal, qui a mené une bataille importante au Québec pour s’assurer que le fait français ne soit pas seulement reconnu au sol et à Radio-Canada au Québec, mais aussi dans le domaine de l’aviation.
À mon arrivée à Ottawa, je l’ai connu pendant les années des gens de l’air, et lorsque je suis revenu à Ottawa comme député en 1977, moment où le sénateur De Bané m’a aidé pendant la campagne électorale en me disant qu’il y avait de la place pour les nationalistes québécois à l’intérieur d’un caucus qui était peut-être perçu comme étant centralisateur.
Le sénateur De Bané et moi avions beaucoup d’amis péquistes en commun à Québec. Le sénateur De Bané venait souvent à Québec — je vois mon amie Élisabeth à la tribune — pour rendre visite à son ami Clément Richard, qui était Président de l’Assemblée nationale, et lui indiquer qu’il avait tout de même un rôle à jouer comme Québécois sur la scène nationale, parce qu’il pouvait être attiré par des sujets québécois.
Je souligne la présence d’Élisabeth parce que j’étais là quand ils ont commencé à se courtiser. Elle était adjointe politique avant de joindre la fonction publique fédérale. C’était quelque chose de voir la passion de Pierre, qui la transmettait à Élisabeth, comme il l’avait fait à toutes ces occasions.
Il était ici quand je suis arrivé dans cette Chambre et m’a énormément aidé à m’adapter à mon nouvel environnement en 2005. Il m’a initié — comme l’a souligné le sénateur Harder — à l’informatique, à l’utilisation des ordinateurs dans notre travail, et m’a forcé à me moderniser à l’aide de ces instruments qui n’étaient pas très utilisés à ce moment-là. Le Président du Sénat de l’époque me reprochait parfois d’entrer au Sénat avec un BlackBerry, car c’était interdit. Cependant, le sénateur De Bané m’avait expliqué que cela se faisait quand même, parce qu’il utilisait cette technologie et était bien en avance sur les gens plus jeunes que lui, comme moi.
J’ai eu beaucoup de plaisir à travailler avec lui. Lorsqu’il a quitté l’Association des parlementaires francophones, il m’a recruté pour lui succéder. J’ai bien tenté, mais je n’ai pas réussi. Je peux vous assurer qu’il était considéré à l’APF comme étant un des grands contributeurs de cette association. La francophonie n’a pas été créée par les gouvernements; ce sont les parlementaires de l’Association des parlementaires francophones qui ont forcé le gouvernement à reconnaître le rôle des francophones partout dans le monde. Il n’y avait pas seulement la France, le Québec et le Canada, mais il y avait une francophonie beaucoup plus vaste.
J’ai souvent adopté des positions opposées à celles du sénateur De Bané sur bien des sujets, et ce, probablement dans toutes les équipes du Parti libéral depuis 40 ans. Nous n’étions pas d’accord, mais nous avons toujours fait cela dans le respect mutuel l’un de l’autre. Je l’ai d’ailleurs toujours remercié. Il avait, à l’occasion, engagé ma jeune fille comme adjointe dans son bureau de sénateur. J’ai toujours apprécié son amitié.
Ma dernière conversation avec Pierre — le sénateur Harder en a parlé, d’ailleurs — portait sur l’avenir de cette Chambre. Aux mois de novembre et de décembre, il m’appelait parce qu’il voulait qu’on diffuse son message; il croyait à l’avenir de cette institution. Rendons-lui hommage et assurons-nous d’être à la hauteur de ce qu’il imaginait pour nous.