L’honorable Pierre J. Dalphond : Honorables sénateurs, je remercie le sénateur Tannas de nous donner l’occasion aujourd’hui de discuter de la pratique qui consiste à insérer dans le projet de loi d’exécution du budget toutes sortes de mesures qui n’ont pas rapport avec le budget, notamment des modifications à diverses lois qui n’ont rien à voir avec les finances et, bien entendu, des éléments encore moins liés au budget, comme une taxe. Peut-être que la tarification du carbone était une question budgétaire, mais selon les conservateurs, il s’agit d’une taxe.
Cette pratique qui a été appuyée par le Sénat aux législatures précédentes doit cesser. Je suis heureux de voir que beaucoup d’entre nous qui étions là à l’époque ont aujourd’hui changé leur fusil d’épaule. Je leur suis reconnaissant d’avoir changé d’opinion concernant ce genre de projet de loi d’exécution du budget.
Comme il a été dit dans le Globe and Mail la semaine dernière, et avec raison, j’estime que cette pratique que le gouvernement actuel perpétue alors qu’il avait promis d’y mettre fin constitue un abus du processus parlementaire qui nous empêche de débattre pleinement de dossiers importants non liés aux aspects budgétaires du programme législatif du gouvernement.
La question est donc la suivante : que faut-il faire pour que les gouvernements conservateurs et libéraux cessent de se livrer à de telles pratiques? Ce que le sénateur Tannas propose, c’est d’ajouter une disposition de caducité à un amendement à la Loi électorale du Canada. Chers collègues, la modification en question a été proposée par le gouvernement sans aucune consultation préalable avec le directeur général des élections ou le commissaire à la protection de la vie privée, comme cela a été dit au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles. En fait, l’amendement n’est rien d’autre qu’une tentative de faire dérailler les procédures judiciaires en cours en Colombie-Britannique introduites par le commissaire provincial à la protection de la vie privée contre tous les partis politiques fédéraux actifs dans la province de la Colombie-Britannique, ce qui exclut le Bloc québécois. Tous ces partis se sont unis pour contester l’autorité du commissaire à la protection de la vie privée de la Colombie-Britannique.
À mon avis, l’approche logique consisterait à proposer la suppression de cet amendement. Pourtant, il semble que le sénateur Tannas propose de le conserver, mais seulement pour une période de deux ans. Ce n’est pas une bonne mesure et elle n’a pas été adoptée à l’issue de consultations préalables, mais il croit qu’elle devrait néanmoins rester en vigueur pendant deux ans. Je ne comprends pas vraiment cette approche.
Cela dit, je pense que notre réponse au projet de loi d’exécution du budget devrait être élaborée en faisant pleine preuve de modération, comme l’a fait valoir le sénateur Shugart hier, dans son discours très intéressant. C’était un excellent premier discours, monsieur le sénateur, et celui d’aujourd’hui était également très bon. Au lieu d’envoyer immédiatement un message à l’autre endroit à la dernière minute, je préférerais adopter une solide motion ou un amendement à notre Règlement qui seront tous les deux publiés bien avant qu’ils n’entrent en vigueur et bien avant le prochain budget.
Au lieu d’un avertissement préalable, ce qu’on propose aujourd’hui est un amendement qui sèmerait vraisemblablement le chaos à la dernière minute avant l’ajournement estival. À mon avis, ce n’est pas une façon sage de réclamer des changements. Par conséquent, je voterai contre l’amendement proposé. Merci.