Étude du rôle du gouvernement dans le combat contre le racisme en comité plénier

Par: L'hon. Jim Munson, Sénatrice Lillian Eva Dyck (retraitée)

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Ottawa River, Gatineau and the

Le sénateur Munson : Je remercie les ministres de leur présence.

Nous avons le privilège d’assister à la présente séance en personne, mais, tandis que je regarde autour de la salle, je ne peux m’empêcher de penser à tous ceux qui sont absents de la Chambre et qui souhaiteraient participer au débat, qui est très important.

Plus tôt cette semaine, vous m’avez entendu présenter les propos et les questions de mes collègues, les sénatrices Lovelace Nicholas et Lillian Dyck. Je vais faire la même chose aujourd’hui. Il y a un préambule, mais il me semble important. La question s’adresse au ministre Blair. Elle provient de la sénatrice Dyck et s’accompagne d’une question complémentaire. Je cite la sénatrice Dyck:

Récemment, en mars, le chef Allan Adam, de la Première Nation des Chipewyans d’Athabasca a été arrêté par la police à Fort McMurray, en compagnie de son épouse. L’étiquette d’immatriculation de son camion était expirée. Ce qui aurait dû être une vérification de routine s’est transformé en un incident violent pour le chef Adam.

La vidéo enregistrée par la caméra de tableau de bord de la GRC montre un policier s’attaquer au chef Adam sans avertissement, lui assener des coups de poing à la tête et avoir recours à la technique d’étranglement par la région carotidienne. Après l’incident, une photo du visage ravagé du chef Adam a choqué et ébranlé la nation. Le chef Adam a déclaré : « Chaque fois qu’un des nôtres commet une faute, [la GRC ] semble toujours avoir recours à une force excessive. Il faut que cela cesse. »

Ce qui est arrivé au chef Adam est un exemple de racisme systémique de la part de la GRC.

Malheureusement, tout comme les femmes autochtones, les hommes autochtones risquent davantage de subir de la violence.

Selon Statistique Canada, en 2018, par exemple, le taux d’homicides chez les hommes autochtones était cinq fois plus élevé que chez les hommes non autochtones.

Ces données prouvent que les hommes autochtones sont victimes de racisme systémique.

On rapporte que 62 % des personnes tuées par la police en Saskatchewan étaient des Autochtones. Pourtant, comme vous le savez, les Autochtones représentent seulement 15 % environ de la population de la province. Ces données prouvent elles aussi que les Autochtones sont victimes de racisme systémique.

Monsieur Blair, on a beaucoup discuté du racisme systémique au cours des deux dernières semaines, surtout après que la commissaire Lucki a eu du mal à dire si ce problème existait au sein de la GRC, puis a affirmé le lendemain que c’était bel et bien le cas. Il était donc vraiment surprenant qu’elle n’ait pas été en mesure de donner un bon exemple de racisme systémique quand elle a comparu il y a deux jours devant le Comité de la sécurité publique de la Chambre des communes lors de la séance sur ce sujet.

En tant que femme autochtone, j’ai été stupéfaite par son manque de perspicacité et de connaissances. Elle a parlé du rapport de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Elle aurait très bien pu dire que le refus de la GRC, pendant des années, de reconnaître la tragédie des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées était un exemple de racisme systémique. Et elle aurait pu dire que c’était du passé, que la GRC reconnaissait maintenant que les femmes autochtones sont plus susceptibles d’être assassinées et portées disparues que les autres et que la GRC collecte désormais des données sur l’identité autochtone et le sexe des victimes d’homicide, qu’elle transmet ensuite à Statistique Canada. Mais elle ne l’a pas fait.

Et quand elle a déclaré qu’à la GRC, on n’a recours à la force mortelle que dans 0,073 % des cas, elle aurait pu affirmer que la surreprésentation des Noirs, des Autochtones et d’autres minorités racialisées parmi les victimes de corrections absurdes ou mortelles de la part de membres de la GRC était un exemple de racisme systémique. Mais, elle ne l’a pas fait.

En tant que citoyenne canadienne, j’ai été gênée de voir que notre commissaire n’était pas en mesure de fournir un exemple de racisme systémique dans la GRC, alors que tout le pays n’a parlé que de cela, ces deux dernières semaines.

Elle n’est tout simplement pas à la hauteur.

Comme vous le savez, j’ai demandé que la commissaire Lucki démissionne ou soit remplacée.

Monsieur le ministre, c’est à vous qu’il revient de demander des comptes à la commissaire Lucki et c’est aussi à vous de trouver une solution à ce qui ne fonctionne pas au sein de la GRC.

La question de la sénatrice Dyck, à laquelle les Canadiens partout au pays méritent d’avoir une réponse, comporte deux volets.

Il est encore plus évident maintenant que la commissaire Lucki ne comprend pas ce qu’est le racisme systémique. Monsieur le ministre, comment peut-elle l’éliminer alors qu’elle ne sait même pas ce que c’est?

M. Blair : Merci beaucoup de la question, monsieur le sénateur.

Lorsque la sénatrice Dyck a exprimé ses craintes initiales, j’ai communiqué avec elle sans tarder. Je lui ai téléphoné, et nous avons parlé pendant un bon moment. Je respecte beaucoup son point de vue et ses préoccupations.

J’ai rencontré la commissaire Lucki pour discuter de ces préoccupations le lendemain de son témoignage difficile au comité. Je ne lui donne pas de directives en ce qui a trait aux décisions opérationnelles, mais nous avons longuement parlé de la GRC, de ses responsabilités et des miennes. Je suis d’accord avec vous, monsieur le sénateur : la commissaire dirige la GRC, mais je suis chargé de veiller à ce que l’organisation assume ses responsabilités législatives et que la commissaire fasse son travail.

J’ai donc parlé avec elle plusieurs fois. Je dois vous dire, monsieur le sénateur, que je suis respectueusement en désaccord avec vous sur un autre aspect : je pense que la commissaire Lucki comprend bel et bien ce qu’est le racisme systémique. Nous avons discuté à plusieurs reprises. Je ne cherche pas à excuser qui que ce soit, mais j’ai participé à ces échanges sur les relations raciales et les services de police, ainsi que sur les tensions qui existent parfois entre la police et les communautés racialisées et autochtones à l’échelle du pays. La commissaire Lucki n’est pas la première ni la seule à avoir de la difficulté à utiliser les bons mots. C’est pourquoi je tiens aussi compte des intentions d’une personne et de ce qu’elle essaie de faire.

Quand nous avons embauché la commissaire Lucki et que nous l’avons nommée à ce poste il y a deux ans, nous lui avons confié une tâche considérable, celle de réformer plusieurs aspects cruciaux de la culture, des politiques, des procédures et de la formation en place à la GRC. Elle travaille avec diligence sur ces enjeux. J’ai travaillé à ses côtés, et j’ai pu voir toute l’ardeur qu’elle met à la tâche. J’ai eu des rencontres avec elle et avec son équipe de cadres supérieurs.

Je crois qu’ils ont à cœur de tenter de poser les bons gestes. La sénatrice Dyck a toutefois raison de dire qu’il faut faire plus. Nous devrions tous être jugés en fonction non seulement de nos paroles, mais aussi de nos actions.

Je crois — je le dis en ayant pleinement conscience de mes responsabilités, monsieur le sénateur — qu’il faut voir à ce que les gestes posés par la GRC, et surtout par la commissaire, nous permettent de servir tous les Canadiens de façon équitable et avec la dignité et le respect auxquels tout le monde a droit.

Nous sommes tout à fait résolus à continuer ce travail. La commissaire aurait pu donner plusieurs exemples, je crois. Je dois dire, en toute honnêteté, qu’en gagnant de l’expérience, je gagne un peu d’aisance pour parler de ces questions. J’ai parlé avec la commissaire de ma propre expérience.

Au cours de notre discussion sur le racisme systémique dans le maintien de l’ordre et dans les collectivités desservies par la GRC, sur le racisme systémique dans le système de justice pénale et dans la société en général, pas seulement dans les activités policières de la GRC, je peux vous assurer que la commissaire a fait preuve d’une excellente compréhension de ces enjeux et, plus important encore, qu’elle a exprimé un engagement ferme à accomplir le travail nécessaire pour changer les choses.

Encore une fois, sénateur, je voudrais que nous soyons évalués sur le fondement des gestes que nous posons. Nous sommes prêts à agir et à faire le nécessaire pour corriger la situation et pas seulement pour répondre aux mauvais agissements individuels — la sénatrice Dyck a fait référence au chef Adam. J’ai communiqué avec le chef régional de l’Alberta, ainsi qu’avec les leaders nationaux. Il est évident que nous avons du pain sur la planche. Nous sommes prêts à nous retrousser les manches.

Le sénateur Munson : Merci, monsieur le ministre. Je crois que vous savez déjà quelle est la deuxième question de la sénatrice Dyck, mais je vais quand même la poser, en son nom :

Que faites-vous présentement — présentement — pour demander des comptes à la commissaire Lucki au sujet de son manque de connaissance concernant le racisme systémique? Quelles mesures avez-vous entreprises, quelles directives administratives ou ministérielles ont été communiquées à la commissaire?

M. Blair : Je parlerais de quelques éléments pertinents à mon avis. Nous avons eu plusieurs discussions. Nous avons témoigné devant un comité, mais nous nous sommes également rencontrés à quelques reprises pour discuter des solutions pour l’avenir et d’une réponse appropriée.

Des enquêtes sont présentement menées concernant diverses allégations. J’ai également communiqué avec la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC, parce que je crois qu’elle représente un pan très important de la surveillance indépendante du processus de plainte.

(1540)

J’ai écouté très attentivement les Canadiens d’un bout à l’autre du pays qui ont exprimé leurs préoccupations au sujet des enquêtes et, en particulier, au sujet de la lenteur des réponses. Lorsque les gens déposent une plainte, je pense qu’ils ont besoin qu’elle soit traitée rapidement. Ils doivent être tenus informés de l’enquête et des mesures qui seront prises. Je pense que la législation actuelle concernant la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC et la GRC ne fournit pas de directives claires concernant les délais.

Je travaille avec les fonctionnaires de mon ministère, la GRC et la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC pour préciser les délais, afin que la GRC et la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC soient tenues de traiter les plaintes dans les meilleurs délais. Actuellement, on le fait dès que c’est possible. Ce n’est pas acceptable. Nous devons être clairs avec les Canadiens. J’ai rencontré certaines des familles. J’ai notamment rencontré la famille de Colten Boushie …

La présidente : Monsieur le ministre, je vous remercie beaucoup. Nous devons passer au prochain bloc de 10 minutes.

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