Troisième lecture du projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir)—Amendement du sénateur Boisvenu

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L’honorable Pierre J. Dalphond : J’ai entendu le discours de mon collègue le sénateur Boisvenu, qui était très intéressant sur le fond. Nous partageons la même opinion sur la question sur laquelle nous nous penchons, soit celle des directives anticipées dans le contexte des maladies qui provoquent une dégénérescence graduelle du cerveau et la perte de la capacité à consentir. C’est un débat qui est avancé au Québec, et je crois qu’il y a un certain consensus qui se dégage quant au fait que nous devrions adopter un régime de directives anticipées.

Toutefois, je m’interroge sur la solution qui nous est proposée.

On propose ici qu’un comité soit créé — peut-être au Sénat, peut-être à la Chambre des communes ou peut-être un comité mixte —, et que ce comité dépose son rapport d’ici un an, ce qui, je suppose, veut dire dans 15 mois. Je soupçonne qu’il y aura des élections d’ici 15 mois. C’est probable et nous devrons nous ajuster en conséquence. Cela me préoccupe.

Je me préoccupe aussi de la loi qui découle du projet de loi C-14, car le préambule du projet de loi C-7 dit ceci :

[…] que la loi prévoit qu’un comité du Parlement entamera, en juin 2020, un examen des dispositions de la loi portant sur l’aide médicale à mourir et de la situation des soins palliatifs au Canada […]

— nous savons que cela ne s’est pas fait —

[…] et que cet examen pourra notamment porter sur les demandes anticipées et les demandes où la maladie mentale est la seule condition médicale invoquée […]

Étant donné la manière dont le projet de loi C-7 a été rédigé, aucun des témoins que nous avons entendus n’a abordé la question des directives anticipées. Elle ne faisait pas partie du projet de loi. Certains témoins y ont fait allusion. Il s’agit sans aucun doute d’une question complexe.

En Belgique, par exemple, où l’on retrouve de telles directives anticipées, une commission est chargée de superviser le processus. Les directives anticipées font l’objet d’une vérification quinquennale. On dit aux personnes : vous avez signé ce document il y a cinq ans. Y consentez-vous toujours?

Un processus très complexe doit être mis au point. Je pense que le comité parlementaire pourrait s’en charger. Je suis toutefois préoccupé par la possibilité qu’il y ait en même temps un comité spécialisé et un autre comité qui serait créé aussitôt que possible, comme le sénateur Gold et le ministre de la Justice nous ont demandé de le faire il y a quelque temps, pour effectuer un examen global du projet de loi C-14 et du régime d’aide médicale à mourir. S’il y a à la fois un comité chargé d’étudier spécifiquement la question des directives anticipées et un autre comité chargé d’étudier tout le reste, comment veiller à ce que les travaux de l’un et l’autre se recoupent? Je pense donc que, pour l’examen du projet de loi, il faudrait plutôt créer un comité qui aurait pour responsabilité d’examiner toutes ces questions ensemble.

Je comprends ce que la suggestion du sénateur Boisvenu tente d’accomplir, et je suis d’accord avec lui. Cependant, je suis convaincu que les engagements pris par le sénateur Gold et le ministre de la Justice dans cette enceinte sont de vrais engagements et qu’il y aura un examen complet au cours des prochains mois. Merci.

L’honorable Stan Kutcher : Sénateur Dalphond, accepteriez-vous de répondre à une question?

Le sénateur Dalphond : Avec plaisir.

Le sénateur Kutcher : Vous avez discuté avec divers psychiatres des termes à employer pour votre amendement et vous avez choisi « troubles neurocognitifs ». Ici, le terme employé est « maladie neurodégénérative ». J’aimerais savoir ce que vous pensez de cela. Les maladies neurodégénératives comprennent notamment l’alzheimer, la sclérose latérale amyotrophique, l’ataxie de Friedreich, la maladie de Huntington et la démence à corps de Lewy. Une panoplie de maladies sont traditionnellement appelées neurodégénératives. Toutefois, je tiens à soulever le fait que, récemment, une foule d’études laissent entendre que la schizophrénie et même la dépression pourraient, elles aussi, être considérées comme des maladies neurodégénératives. Par exemple, de multiples études sur la dépression révèlent une atrophie ou perte neurale dans diverses parties du cerveau, dont le cortex et l’hippocampe, et de plus en plus de scientifiques pensent que ces maladies sont également neurodégénératives. Croyez-vous qu’il y aurait lieu de revoir le libellé pour en resserrer la portée si l’on vise principalement les troubles neurocognitifs?

Le sénateur Dalphond : Il est quelque peu difficile de répondre aux questions d’un expert qui vous demande ce que vous pensez de son opinion d’expert.

Je serais tenté de m’en remettre à son expertise. Cela dit, je dois dire que les psychiatres que j’ai consultés m’ont recommandé d’employer « trouble neurocognitif » plutôt que « maladie neurodégénérative » puisque, comme notre expert vient de le souligner, il ne s’agit pas tout à fait de la même chose. Voilà pourquoi, dans ma motion, j’ai parlé précisément de trouble neurocognitif.

Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup, Dr Dalphond… ou plutôt, sénateur Dalphond.

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