L’honorable Peter Harder : J’aimerais faire de brefs commentaires au sujet de la motion concernant le message que nous avons reçu de l’autre endroit en ce qui a trait au projet de loi C-7, Loi modifiant le Code criminel (aide médicale à mourir).
D’abord, je voudrais remercier ceux qui ont contribué à l’étude du projet de loi par le Sénat. Je pense à la contribution de nombreux sénateurs, notamment à celle du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, sous la présidence de la sénatrice Jaffer, et à celle de la sénatrice Petitclerc, la marraine du projet de loi, dont le dévouement et le leadership infatigable sont une inspiration pour nous tous.
En outre, je tiens à remercier tous les sénateurs qui ont pris part aux débats tenus auparavant ou qui ont proposé divers amendements, dont certains sont reflétés dans le message de réponse. Enfin, je veux remercier le sénateur Gold. Je comprends un peu ce qu’il vit en tant que représentant du gouvernement au Sénat. Il a fait un travail remarquable à titre de représentant du gouvernement au Sénat en ce qui a trait au projet de loi et au point de vue des sénateurs qui est reflété dans les amendements adoptés, amendements qu’il s’est assuré que le gouvernement étudie comme il se doit.
Le projet de loi C-7 s’est avéré extrêmement difficile pour nous tous, quelle que soit nos convictions. Je sais qu’en tant que parlementaires, nous sentons tous sur nos épaules le poids de notre responsabilité. Ce dossier touche aux questions fondamentales de la vie qui se posent à nous, les êtres humains, puisque nous sommes tous destinés à mourir.
Au cours de délibérations exhaustives, nous avons pu voir à l’œuvre la force de la raison et des arguments; nous avons également pu observer la force des sentiments et de notre expérience personnelle. En effet, nous avons été secoués par l’exercice de profonde introspection que requiert une telle mesure législative. En tant que législateurs, nous comprenons la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant, ayant reçu le message de l’autre endroit.
Chers collègues, j’estime que le Sénat a fait son travail. Nos délibérations et nos travaux ont suscité un débat public passionné et captivant.
À mon avis, les amendements que nous avons apportés ont amélioré le projet de loi dans une large mesure et entraîné une nouvelle réflexion et un nouveau débat à l’autre endroit et dans le grand public. Nos amendements ne sont ni le travail d’une institution illégitime, comme certains voudraient nous le faire croire, ni une approbation automatique. Le Sénat a pour tâche de provoquer, d’enquêter et de recommander des améliorations, ainsi que d’exhorter le gouvernement et la Chambre des communes à examiner les amendements et les réflexions qu’il propose.
Le rôle de la Chambre des communes et du gouvernement consiste à examiner sérieusement les recommandations, les amendements et les points de vue du Sénat.
J’estime que tout cela s’est fait de façon respectueuse dans le cadre d’un dialogue sincère. La Chambre des communes s’est efforcée de trouver un compromis concernant les amendements proposés par le Sénat. C’est la tâche qui lui incombe. Les députés représentent la population. Le gouvernement, quant à lui, sera tenu de rendre des comptes. Il doit en être ainsi parce que c’est à l’autre endroit qu’incombe l’obligation démocratique de rendre des comptes concernant les politiques publiques.
Certains, notamment le professeur Andrew Heard de l’Université Simon Fraser, soutiennent :
Si la tâche principale du Sénat consiste à effectuer un second examen objectif, ce rôle semble avoir été rempli dès que la Chambre des communes répond aux amendements proposés par le Sénat. […] L’alternative revient à opposer inutilement la volonté des députés élus à celle des sénateurs nommés, le Sénat entravant alors le travail de la Chambre élue au lieu de le compléter.
Chers collègues, les débats du Sénat au sujet de l’aide médicale à mourir montrent la voie à suivre pour l’exercice du rôle du Sénat en tant qu’assemblée législative complémentaire chargée de porter un second regard objectif. Nous pouvons être fiers du fait que le projet de loi est généralement perçu comme ayant été amélioré grâce aux amendements qui ont été acceptés à l’autre endroit sans que l’intégrité fondamentale de cette mesure législative ait été modifiée.
Le gouvernement, la Chambre des communes et les Canadiens ont bénéficié du second regard objectif de notre assemblée. Nous avons établi un dialogue institutionnel constructif entre une Chambre élue et une Chambre nommée. À titre d’organe législatif destiné à mener un examen complémentaire des projets de loi gouvernementaux avant qu’ils ne deviennent des lois du pays et à servir de contrepoids à la majorité qui règne à l’autre endroit, le Sénat joue un rôle important dans notre système parlementaire bicaméral. Par contre, un système bicaméral solide et respectueux de la démocratie a ses limites, en particulier dans le contexte d’un gouvernement minoritaire à la Chambre des communes.
Le Sénat est un organisme consultatif et non un organisme qui doit rendre des comptes sur le plan politique. Notre tâche consiste à donner des avis et à proposer des amendements aux projets de loi, s’il y a lieu, afin de les améliorer, mais nous ne devons pas faire obstruction. La responsabilité politique appartient à l’autre Chambre. Je soumets respectueusement que c’est en approuvant le message de l’autre endroit, en non en insistant sur d’autres amendements, que nous aurons rempli notre rôle d’organisme complémentaire de second examen objectif.
Notre ancien collègue le sénateur Tkachuk a compris qu’au bout du compte, le droit de gouverner appartient à ceux qui sont élus pour le faire par les citoyens du pays. Il y a cinq ans, lors d’un discours passionné qu’il a prononcé sur le message reçu de la Chambre des communes concernant le projet de loi C-14 — et, n’oubliez pas, il s’est opposé à cette mesure législative —, il a dit ceci :
Nous ne pouvons pas — et je ne le ferai pas — nous opposer à la volonté des députés élus. Nous avons fait notre travail et, même si cela me brise le cœur, je continuerai de faire mon devoir en votant en faveur de ce projet de loi, sous la forme où il nous a été renvoyé par les représentants du peuple.
Au bout du compte, chers collègues, le Sénat n’a pas pour rôle d’approuver automatiquement les projets de loi ou de rivaliser avec les représentants du peuple. C’est ainsi que l’ont prévu les Pères de la Confédération et, plus important encore, c’est ce que les Canadiens attendent de nous.
Je vous demanderais donc d’approuver le message que nous avons reçu et de valider la décision de l’autre endroit. Merci.