L’honorable Jim Munson propose que le projet de loi S-223, Loi instituant la Semaine de la gentillesse, soit lu pour la deuxième fois.
— Honorables sénateurs, c’est la première fois que je participe à une séance hybride depuis chez-moi — je suis habituellement présent au Sénat. C’est vraiment une gentille attention pour mon projet de loi sur la Semaine de la gentillesse.
Dans un esprit de gentillesse et de réconciliation, je reconnais que nous sommes réunis ce soir sur le territoire non cédé du peuple algonquin anishinaabe. C’est un important geste de gentillesse de le reconnaître chaque fois que nous nous réunissons.
Honorables sénateurs, je suis fier de prendre la parole à l’étape de la deuxième lecture de la Loi instituant la Semaine de la gentillesse. C’est la deuxième fois que je présente ce projet de loi et je suis heureux de le faire en l’honneur du rabbin Reuven Bulka, fondateur de Canada généreux, car c’est lui l’architecte et l’inspiration derrière ce projet de loi d’intérêt public du Sénat. J’espère contribuer à la réalisation de sa vision pour une semaine nationale de la gentillesse et voir les Canadiens la célébrer partout au pays pendant la troisième semaine de février.
La première semaine de la gentillesse a eu lieu il y a 14 ans à Ottawa. Le rabbin a expliqué ce qui l’a amené à créer cette semaine lorsqu’il est venu témoigner devant le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie en 2018. Voici ce qu’il avait dit :
Mes motifs, dans la constitution de la Semaine de la gentillesse à Ottawa, étaient de stopper l’épidémie d’intimidation qui s’était répandue dans nos écoles. Ils obéissaient à une logique simple : inviter les enfants à l’apathie n’est d’aucun secours, et on risque parfois d’obtenir le contraire des résultats recherchés. Mais si on aide les enfants à agir avec bonté les uns avec les autres et à se dire de bonnes choses, on produit le type d’énergie positive qui étouffe l’intimidation.
Chers collègues, voilà ce qui m’a motivé à contribuer à ce projet. Au fil des ans, mon travail au sujet des droits des enfants, auprès de la communauté des personnes handicapées, d’Olympiques spéciaux Canada et de familles ayant un enfant autiste m’a ouvert les yeux à la réalité et aux effets de l’intimidation. La semaine de la gentillesse pourrait contribuer à favoriser l’inclusion et à améliorer la vie de tellement d’enfants et d’adultes.
Je remercie tous les sénateurs qui avaient appuyé ce projet de loi au comité et au Sénat pendant la législature précédente. J’ai été déçu qu’il ne soit même pas présenté à l’autre endroit avant les élections, mais j’espère que la présente législature réservera un meilleur sort à la semaine de la gentillesse.
Chers collègues, j’ai été encouragé par vos commentaires sur ce projet de loi et par les anecdotes d’actes de gentillesse dans nos collectivités. Je me souviens du discours réfléchi de la sénatrice Mary Coyle au sujet de ce projet de loi. Elle nous avait rappelé les travaux du Dr Brian Goldman sur la gentillesse et des leçons tirées de son ouvrage, The Power of Kindness: Why Empathy Is Essential in Everyday Life. L’empathie ne saurait effectivement être plus essentielle qu’en cette période de pandémie. Je vous recommande de lire cet ouvrage.
Dans son ouvrage, le Dr Goldman indique que les enfants apprennent plus facilement la gentillesse quand leurs modèles en font preuve. C’est un rappel important pour nous, législateurs, particulièrement maintenant que nos débats sont télévisés. Les jeunes écoutent et apprennent constamment et nous sommes leurs modèles.
Au cours de la dernière session, notamment lors de l’étude du projet de loi précédent, la sénatrice Martin a parlé de l’expérience de la bienveillance du point de vue de la communauté coréenne du Canada. Elle a également suggéré l’inclusion de cette vertu dans les programmes scolaires. La sénatrice Martin a présenté un point de vue important en tant qu’ancienne enseignante et défenseure des droits des enfants. Il est vrai que c’est sur la vie des enfants et des jeunes du Canada que ce projet de loi aura la plus grande incidence. Certains enseignants introduisent maintenant la notion de gentillesse dans leurs plans de leçons et ils notent un changement dans le rendement et les interactions des enfants.
L’instauration à l’échelle nationale d’une semaine de la gentillesse ajouterait des ressources pour les éducateurs et offrirait aux jeunes des occasions de mettre la gentillesse en pratique à l’école, dans la collectivité et à la maison.
Lorsque le Comité des affaires sociales a examiné le projet de loi, il a entendu le témoignage de Jennifer Levine, enseignante et bénévole auprès de l’organisme Canada généreux, qui a aidé à élaborer et à mettre en application des programmes sur la gentillesse pour les enfants des 3e, 4e et 6e années du primaire. Mme Levine a déclaré que les parents, les enseignants et les élèves n’avaient que des bons mots au sujet des programmes et que, par surcroît, les élèves étaient enthousiastes à l’idée de faire part de leur expérience de la gentillesse. Certains ont même dit que les leçons sur la gentillesse avaient été les moments les plus intéressants de l’année.
Mme Levine a également ajouté :
La sensibilisation à la gentillesse est très importante pour la croissance et le développement positifs de tous les enfants. Une semaine consacrée à la gentillesse suscite souvent cet enthousiasme et motive les enseignants, le personnel administratif et les étudiants à favoriser une culture de gentillesse dans les écoles.
Nous observons la mise sur pied de clubs de gentillesse et l’émergence de leaders étudiants. Les enfants, comme les adultes, récoltent les avantages de la gentillesse, qu’ils en soient les auteurs ou les personnes qui la reçoivent. Cela leur permet de se sentir bien, ce qui les inspire à continuer. Imaginez l’inspiration qui pourra être générée lorsque tous les habitants d’un pays feront preuve de gentillesse en même temps. Je sais d’expérience que les effets d’une semaine nationale de la gentillesse seront puissants et qu’ils pourront transformer la culture dans nos écoles.
Faire preuve de gentillesse favorise le développement social, économique et affectif et améliore les relations entre pairs. La gentillesse favorise l’inclusion. En liant toutes les initiatives de gentillesse d’un océan à l’autre, cela encouragera plus de gens à participer et apportera un avantage collectif à tous les Canadiens.
En parlant de gentillesse, j’ai reçu tellement de lettres. J’ai écrit un éditorial qui a paru dans le Ottawa Citizen la semaine dernière et je viens de recevoir des dizaines de lettres d’élèves d’Ottawa. Je veux citer un extrait de la lettre d’Eva, qui dit ceci :
Bonjour sénateur Jim Munson,
J’espère que vous vous portez bien en cette période. Je m’appelle Eva et je suis une élève de septième année à l’école publique Vincent Massey. Ma classe et moi vous écrivons après avoir lu un article sur la semaine de la gentillesse et le travail que vous avez fait avec le rabbin Bulka il y a quelques années.
Elle a ensuite écrit en caractère gras ce qui suit :
Nous formons le groupe Students On the Leading Virtual Edge, ou SOLVE. Nous sommes un groupe philanthropique étudiant qui espère encourager les membres de la communauté voisine de Russell Heights à surmonter les difficultés actuelles.
Elle explique ensuite ce que les élèves ont fait avec l’aide de leur enseignant et elle parle du virus et du fait qu’il a rapidement mis fin à tout espoir de visiter en personne les habitants de la région pour l’instant, mais cela ne les a pas déçus. Les élèves sont allés de l’avant, et Eva dit qu’ils ont pris le concept de « gestes de bonté gratuits » et l’ont appliqué au contexte de la distanciation sociale et du port du masque. Elle a ajouté ceci :
Après en avoir discuté et avoir examiné différentes options, nous avons décidé d’inclure dans chaque sac de bonté un masque, étant donné que l’un des élèves en fabriquait, ainsi qu’un jeu mathématique créé par un élève, un petit bonbon à déguster, des casse-têtes logiques pour se remuer les méninges et une page à colorier pour se détendre, en plus d’autres articles.
Les élèves ont organisé un glisse-o-thon et ils ont travaillé vraiment fort. Ce sont des élèves de septième année d’Ottawa. J’imagine une telle chose aux quatre coins du pays. Les élèves ont organisé un glisse-o-thon et ils ont reçu des dons. Eva a indiqué qu’ils viennent de compter l’argent et qu’ils ont recueilli 1 700 $.
Elle a ajouté ceci :
Bientôt, nous aurons reçu tout le matériel et les commandes nécessaires pour commencer à créer les sacs de gestes de bonté gratuits. J’espère que nous aurons une incidence positive, qu’elle soit grande ou petite.
Elle termine ainsi :
Nous vous serions très reconnaissants de communiquer avec nous pour nous faire part de vos commentaires. Au plaisir d’avoir de vos nouvelles!
Eh bien, Eva, je viens de le faire en direct à la télévision, au Sénat du Canada, un mercredi soir, en pleine pandémie. Je trouve que ce que ta classe fait est très important et montre bien que ce n’est pas seulement une question de sensibilisation. Il faut aussi participer aux efforts déployés au pays, s’impliquer et voir ce que nous pouvons apprendre des enfants. J’ai toujours dit que l’on peut bien chercher à s’assagir en vieillissant, mais qu’il faut toujours regarder le monde avec des yeux d’enfant.
Nous avons tous été touchés par la gentillesse d’une manière ou d’une autre. Les effets peuvent être indirects et ils passent parfois inaperçus. C’est ce qu’a dit le rabbin Bulka lors de sa dernière comparution devant le comité :
Il se fait beaucoup de recherche sur la gentillesse et ses conséquences, qui sont essentielles à notre compréhension de leur grande efficacité. Nous savons que la gentillesse permet d’abréger d’une journée en moyenne les séjours comparables de longue durée à l’hôpital. Sans parler des économies évidentes.
Honorables sénateurs, l’idée de la Semaine de la gentillesse est peut-être nouvelle pour certains d’entre vous, mais en Ontario, elle existe depuis 10 ans, et la ville d’Ottawa la célèbre depuis 2007. La Colombie-Britannique souligne également les actes de gentillesse spontanés au cours du mois de février. L’ONU a désigné une journée internationale de la gentillesse en novembre.
Pour d’autres, la gentillesse est une valeur familiale depuis des générations. Cela me fait penser à une de mes histoires préférées sur la gentillesse. Je l’ai entendue lors d’une réunion du comité. C’est un sénateur qui nous l’a racontée, et je ne tenterai pas d’imiter son accent ce soir. Je ne lui rendrais pas justice. Toutefois, j’ai voyagé avec le sénateur Fabian Manning et j’ai été son interprète à quelques occasions. Il comprendra ce que je veux dire. Or, il a déclaré ce qui suit au sujet de la gentillesse, en parlant de sa mère :
C’était une femme très gentille et généreuse. J’ai une carte, en fait, dans mon bureau, avec ses sages paroles : « On peut oublier le numéro de téléphone, l’adresse et même le nom d’une personne, mais on n’oublie jamais sa gentillesse ».
La maman du sénateur Manning.
J’aimerais vous remercier, sénateur Manning, de nous avoir parlé de ce souvenir. J’ai eu la chance de travailler et de voyager avec le sénateur, entre autres, dans le cadre des travaux du Comité sur les pêches. Je peux vous dire qu’il a suivi les conseils de sa mère pour ce qui est de la gentillesse, même s’il se moque de moi de temps en temps. Je n’entrerai pas dans les détails, mais c’est Fabian tout craché.
Sénateurs, j’aimerais beaucoup entendre ce que vous avez à raconter au sujet de la gentillesse et de son incidence dans votre vie. Je pense aux initiatives de gentillesse dans vos provinces respectives, surtout dans le contexte des nouvelles contraintes que nous vivons tous les jours depuis le début de la pandémie.
Honnêtement, nous ne devrions pas avoir besoin d’une semaine désignée, mais les faits montrent clairement que les campagnes et les rappels encouragent les gens à agir. Ainsi, pourquoi ne pas créer des occasions d’apprendre et de pratiquer la gentillesse pendant le mois le plus court, mais sans doute le plus froid et le plus enneigé de l’année, du moins ici, à Ottawa?
Je sais que beaucoup diront, « Pourquoi avons-nous besoin d’une journée ou d’une semaine désignée, ou même d’un mois? » Cependant, la majorité d’entre nous aime les anniversaires, les commémorations et les célébrations. Dans l’ensemble, nous profitons de ces jours pour réfléchir, pour nous rassembler et pour célébrer avec les autres. En désignant des journées spéciales, cela nous motive à respecter les occasions spéciales et à créer des souvenirs et des traditions qui dureront toujours.
Je sais que je me répète, mais la création de la Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme, qui découle d’un projet de loi que j’ai présenté il y a de nombreuses années — soit dit en passant, il nous a fallu environ trois ans pour l’adopter, alors il faut parfois être patient —, a rallié les gens de la communauté autistique au Canada. Plus que de hisser un drapeau, il s’agissait de mettre sur pied des programmes, de capter l’attention des gouvernements et de mobiliser la communauté autistique. Il s’agissait de favoriser l’inclusion. Ainsi, je sais qu’une journée désignée, ou une semaine, dans ce cas, peut changer les choses dans la vie des gens que nous représentons ici.
Le projet de loi nous invite donc à faire de la troisième semaine de février la « Semaine de la gentillesse ». Le bref préambule souligne aussi que la gentillesse incite à faire siennes les valeurs que sont l’empathie, le respect, la gratitude et la compassion; que les actes de gentillesse contribuent à améliorer la santé et le bien-être des Canadiens; que certaines villes canadiennes célèbrent déjà la Semaine de la gentillesse; que la désignation de la Semaine de la gentillesse et sa célébration partout au pays inciteront les Canadiens à poser des actes de gentillesse et à faire du bénévolat et des dons au bénéfice de l’ensemble de la population canadienne; que la Semaine de la gentillesse permettra la mise en commun, par des particuliers et des organismes, de ressources, de renseignements et d’outils, entraînant ainsi la multiplication des actes de gentillesse; et que le Parlement estime que la Semaine de la gentillesse pourrait favoriser la création d’une culture de gentillesse au Canada tout au long de l’année.
Ce préambule a été choisi en collaboration avec la communauté de la gentillesse. Il reflète, selon moi, la façon dont le rabbin Bulka envisage la Semaine de la gentillesse, une vision qu’il a présentée au comité en 2018. Voici ce qu’il avait alors dit à propos du projet de loi :
S’il est adopté, comme je le souhaite ardemment, il est susceptible d’élever la conscience du Canada à l’importance de la gentillesse, et l’adhésion consécutive à la gentillesse rendra encore plus grand notre pays et lui permettra de régler certaines des crises qu’il affronte, notamment celles de la santé mentale, des coûts du système de santé et de l’intimidation.
En conclusion, honorables sénateurs, je vous remercie de votre patience envers moi. Si je m’étends un peu longuement sur le sujet, c’est parce que je veux voir les choses faites correctement, car c’est tellement important. Nous en sommes à l’étape de la deuxième lecture, où il est question du principe du projet de loi. Il s’agit de la même version du projet de loi qui a franchi toutes les étapes dans cette enceinte en 2018 en neuf mois, et a été adopté à l’unanimité à l’étape de la troisième lecture. C’est là une courte période — qui inclut la pause estivale, soit dit en passant.
Cette fois-ci, je veux vraiment que le projet de loi sur la Semaine de la gentillesse franchisse rapidement les étapes du processus dans les deux Chambres avant qu’il y ait d’autres élections. Les élections semblent barrer la voie à la gentillesse.
J’aimerais que cela se produise en l’honneur du rabbin Bulka. Il a tant donné — je le dis sans vouloir me montrer trop émotif. On se souvient tous des discours qu’il a prononcés au pied du Monument commémoratif de guerre, mais il a fait beaucoup plus pour la ville d’Ottawa et pour le Canada.
Le rabbin Bulka est tenu en haute affection par tous ceux, quelle que soit leur religion, qui ont pu profiter de ses conseils spirituels, mais peu de gens savent qu’il est désormais atteint d’un cancer avancé du pancréas et du foie. Je sais qu’il lutte contre la maladie et je suis persuadé qu’il peut compter sur nos prières. Je sais aussi ce que la semaine de la gentillesse représente pour lui, alors j’aimerais beaucoup lui faire ce cadeau.
Le rabbin Bulka est un bâtisseur de ponts. Lors d’une séance de prières qui a été organisée en son honneur ici à Ottawa, l’ex-gouverneur général David Johnston l’a nommé « champion de l’inclusivité », un titre qui lui va à merveille. La gentillesse est synonyme d’inclusivité, et le rabbin Bulka est la gentillesse incarnée.
J’espère que je pourrai compter sur votre appui, chers collègues, pour faire de la semaine de la gentillesse une réalité.
En terminant, j’aimerais simplement vous rappeler qu’il n’y a aucun désavantage à la gentillesse : aucun, zéro. Elle ne coûte rien et prend seulement un peu de temps et d’énergie. Les enseignants, les jeunes, les organismes de bienfaisance et les groupes communautaires seront les grands gagnants lorsque le Canada au grand complet célébrera la semaine de la gentillesse. À long terme, les gens seront plus heureux, ils jouiront d’une meilleure santé et leurs relations interpersonnelles se porteront mieux. Il n’y a rien de plus canadien que la gentillesse. C’est notre plus grande qualité, et j’aimerais sincèrement que le Canada soit le premier pays du monde à en faire une semaine nationale officielle.
Je vous remercie, meegwetch.