Le sénateur Harder : Bon après-midi à tous, et merci aux ministres et aux fonctionnaires d’être ici aujourd’hui. Je suis probablement l’une des rares personnes à Ottawa qui pense que le travail du Conseil du Trésor est aussi important qu’excitant. J’aimerais saisir l’occasion de poser quelques questions au ministre sur le rôle du Conseil du Trésor, surtout dans le contexte des mesures qui ont été prises en lien avec la COVID et du caractère changeant des programmes et des montants que nous sommes appelés à approuver.
Le Conseil du Trésor, c’est connu, est traditionnellement le ministère responsable de veiller à l’intégrité des programmes, d’évaluer les programmes et de faire en sorte que l’argent des contribuables soit utilisé judicieusement et prudemment.
J’aimerais que le président du Conseil du Trésor réponde à la question suivante : quelles étapes additionnelles, outre les pratiques courantes du ministère, ont été mises en œuvre à la suite des mesures liées à la COVID afin de veiller à ce que les allocations substantielles et soudaines versées dans le cadre des nouveaux programmes respectent les normes d’intégrité et d’efficience habituelles?
M. Duclos : Merci, sénateur Harder. Je vous remercie de cette marque de gentillesse et d’appuyer le rôle du Conseil du Trésor, et peut-être aussi de son président. Oui, c’est effectivement un organisme central important, mais peut-être aussi un organisme dont le travail est plutôt discret, dans bien des cas, lorsqu’il appuie d’autres organismes et ministères importants du gouvernement.
Durant la crise actuelle, nous avons pris différentes mesures afin de pouvoir faire les choses rapidement, mais en tenant compte des préoccupations en matière d’intégrité et d’optimisation des ressources que vous avez également signalées, et à juste titre.
Nous avons dû être agiles et, en même temps, diligents et responsables. À titre d’exemple des mesures prises, nous avons communiqué clairement à l’ensemble des ministères et des fonctionnaires de toutes les régions et de tous les échelons non seulement une attente, mais aussi une exigence selon laquelle ils doivent documenter toutes les mesures mises en place — parfois de manière relativement rapide — et devront fournir tôt ou tard des renseignements complets aux institutions importantes, comme le Commissariat à l’information, le Bureau du vérificateur général et d’autres organismes centraux du gouvernement du Canada.
Par ailleurs, nous avons dû nous montrer agiles et rigoureux pour être en mesure de suivre le nombre élevé des demandes dans le secteur des soins de santé et de la santé publique en soutenant la recherche médicale, le dépistage, les traitements et les vaccins et en assurant un approvisionnement à un niveau et à un rythme sans précédent dans l’histoire du Canada. Pour ce faire, nous travaillons avec Services publics et Approvisionnement Canada et nous utilisons d’autres mécanismes importants pour les ressources humaines, la technologie et la gestion financière, ce que le Conseil du Trésor doit absolument faire.
Le sénateur Harder : Je vais maintenant passer aux activités « normales », si je puis dire, relatives aux programmes. Quelles mesures votre ministère prend-il pour garantir que les ressources nécessaires sont consacrées aux autres programmes qui ne concernent pas les initiatives liées à la COVID, et que ces programmes sont efficacement surveillés pour assurer leur intégrité?
M. Duclos : Pour répondre brièvement, le Secrétariat du Conseil du Trésor a le privilège de compter en son sein des employés dont le niveau d’expertise et le dévouement ne sont malheureusement pas très visibles, du moins pas suffisamment pour la majorité des Canadiens et même pour les parlementaires. Je le sais maintenant avec certitude. En effet, je suis président du Conseil du Trésor depuis quelques mois maintenant, et je peux vous dire que, même dans le cadre d’une situation d’urgence comme la COVID-19, des efforts appropriés, comme vous l’avez suggéré, ont été déployés pour que les activités du gouvernement non liées à la pandémie soient assujetties aux bonnes procédures en matière d’intégrité et de surveillance. Ce degré exceptionnel de dévouement, d’expertise et d’engagement assure le bien-être des Canadiens.
Le sénateur Harder : La dernière question que j’aimerais vous poser en votre qualité de président du Conseil du Trésor porte sur la transparence. On entend beaucoup parler de transparence. Certes, les divers sites Web des ministères communiquent beaucoup de renseignements au public et aux parlementaires, non seulement à titre d’information, mais également pour leur permettre d’exiger des comptes du gouvernement.
L’une des difficultés tient au fait que de nombreuses fenêtres permettent d’observer ce qui se fait sur le plan de la transparence, mais qu’aucune de celle-ci n’offre une vue d’ensemble. J’aimerais savoir si le Conseil du Trésor examine des moyens de rajuster les exigences de reddition de comptes relatives aux résultats obtenus afin de mettre à profit les outils supplémentaires, notamment électroniques, qui ont été créés pendant la crise à des fins de transparence et qui offriraient un meilleur contexte pour la reddition de comptes en matière de résultats obtenus, par ministère.
M. Duclos : Merci. J’aime votre observation selon laquelle on peut voir ce que fait le gouvernement en regardant à travers diverses fenêtres, mais que celles-ci n’offrent pas nécessairement une vue d’ensemble. C’est tout à fait vrai. C’est pourquoi mon ministère et celui du ministre des Finances ont joué un rôle de premier plan à cet égard. Nous avons présenté des rapports bimensuels aux comités parlementaires concernés.
Il y a deux plateformes clés de disponibles, où des informations importantes ont été publiées au cours des dernières semaines. La première est l’InfoBase du gouvernement du Canada, qui contient des renseignements importants sur les mesures et les coûts connexes. Il y a aussi le portail Gouvernement ouvert, qui a permis la divulgation complète et automatisée de près de 150 mesures d’urgence distinctes visant la COVID-19.
Outre les réponses aux questions légitimes que les sénateurs et les députés ont posées à maintes reprises sur les activités du gouvernement, il y a eu un bon souci de transparence. Bien entendu, il est toujours possible de faire mieux. Nous devrions toujours chercher à nous améliorer, mais je crois que le niveau de transparence a été bon, étant donné les circonstances.
Le sénateur Harder : Merci.
Ma prochaine question s’adresse au ministre Morneau.
À la une du Financial Times d’hier, on pouvait lire que la société Brookfield Properties pourchasse de petits détaillants qui lui doivent des milliers de dollars sur le loyer de locaux de magasins qui ont dû fermer leurs portes en raison de la pandémie de coronavirus. Au même moment, le groupe canadien d’investissement saute des paiements hypothécaires et en appelle à l’indulgence de ses prêteurs. L’article décrit, en s’appuyant sur divers documents reçus, comment la société serre la vis à ses locataires tout en demandant à ses créanciers de faire preuve de compréhension.
Je sais que ce dossier ne relève évidemment pas directement du ministre des Finances. Toutefois, vous avez déjà parlé de l’esprit dans lequel les mesures du gouvernement ont été prises et de l’aide qu’il fournit. Je vous invite à commenter la coopération des grandes sociétés, dans cet esprit, dans leur secteur de responsabilités.
M. Morneau : Eh bien, merci, sénateur Harder. Tout d’abord, je n’ai pas vu cet article; je ne peux donc pas faire de commentaires sur la situation de Brookfield et de ses locataires.
En ce qui concerne votre question d’un ordre plus général, je dirai que nous avons essayé d’élaborer des mesures qui inciteraient les participants sur le marché à s’entendre, et c’est ce que visait l’approche que nous avons choisie pour l’aide d’urgence pour le loyer. Elle devait inciter les propriétaires à collaborer avec leurs locataires puisqu’ils étaient assurés de recevoir 75 % de leurs paiements, et c’était une mesure incitative pour les locataires parce qu’ils n’avaient que 25 % à payer. Ce programme commence maintenant à prendre de l’ampleur — ce qui est positif —, parce que de nombreuses provinces ont mis en place un moratoire temporaire sur les expulsions de locataires commerciaux.
À votre question directe, je répondrai que nous avons en fait travaillé avec certains des plus grands propriétaires du pays. J’ai parlé personnellement avec un certain nombre d’entre eux, pas avec Brookfield mais avec d’autres grands organismes qui ont un grand nombre de locataires commerciaux. J’ai parlé aux responsables de grandes caisses de retraite canadiennes qui, en fait, m’ont répondu dans tous les cas vouloir adopter l’approche que nous avons mise en place en matière de loyers commerciaux afin d’essayer de résoudre le problème auquel ils sont confrontés, à savoir le fait que les locataires n’ont pas l’argent pour payer et que les propriétaires, bien sûr, ne veulent pas y laisser leur chemise. Ils estimaient que le programme était adapté à ce problème.
Je pense que cela répond globalement à votre question.